Spiritualités

 
 
 

La Magie Ordinaire de la Vie

 

Cette article sur "La magie Ordinaire..." est une adaptation d'un passage du livre de Chogyam Trungpa, "la voie sacrée du guerrier".

Le monde du soleil couchant et le monde du soleil levant

Assurer un pont entre la sagesse de notre être et la puissance des choses telles qu'elles sont ! Si nous parvenons à rassembler ces deux choses, nous découvrons la magie qui existe en toutes choses...

Mais comment établir ce lien ?

La voie pour y accéder passe par l'établissement de l'énergie au delà de l'agression. Entrer en contact avec cette énergie par la douceur, l'ouverture et la bonté fondamentale plutôt que par l'agressivité.

Il est possible de discerner deux modes de vie, deux "mondes" : l'un est appelé le monde du soleil couchant par Chogyam Trungpa et l'autre le monde du soleil levant.

Le monde du soleil couchant est fondé sur la peur de soi, la peur de la mort. La lâcheté et l'agressivité de ce monde écarte toute possibilité de magie, c'est à dire toute possibilité de faire l'expérience de la réalité dans ce qu'elle a d'authentique et d'éclatant.

A l'opposé, le monde du soleil levant est celui qui nous fera découvrir la magie de l'ordinaire. Dans ce monde de vaillance, nous transcendons la lâcheté, nous sommes sans fausseté, c'est à dire au delà de l'illusion et de la tendance à douter de nous même.

Mais il nous faut sûrement définir ce que l'on entend par magie, car le vocabulaire est en ceci trompeur que derrière un mot chacun y met sa propre définition, sa propre illusion de la réalité.

La magie, ordinairement, est vue comme un moyen de conquérir les éléments, par exemple de transformer la terre en feu ou l'eau en terre en faisant fi des lois de la physique la plus ordinaire. En réalité, il ne s'agit pas ici de magie, mais d'illusion, de poudre au yeux, de prestidigitation.

La véritable magie est la magie de la réalité telle qu'elle est : c'est la terre de la terre et l'eau de l'eau, selon les écrits de Chogyam Trungpa. Voir une personne telle qu'elle est et non une "image" de la personne telle que notre ego se l'imagine, ou aimerait la trouver. C'est l'authenticité. Cette magie de la réalité est, a été et sera toujours là, car c'est communiquer avec les éléments de manière à ce qu'ils fassent un avec nous.

La signification de ces deux mondes, de ces deux modes de vie nous fait prendre conscience que nous pouvons influer sur notre milieu, en choisissant le monde dans lequel nous souhaitons vivre, afin d'organiser notre vie au mieux de nos intérêts véritables : transcender la frustration de vivre un monde qui nous agresse.

Le monde externe qui nous entoure

En premier lieu, il nous faut établir la magie de notre environnement physique.

Notre demeure peut être aussi exiguë qu'un studio d'une seule pièce ou aussi vaste qu'un manoir. La manière d'organiser et d'entretenir cette espace est d'une importance capitale.

Si notre espace de vie est chaotique et désordonné, la magie ne pourra pas s'installer. Qu'on me comprenne bien, il ne s'agit pas ici de donner des leçons de morale, pour montrer du doigt untel ou unetelle et le mettre au ban de la société pour cause de désordre. Non ! Mais créer un environnement harmonieux encourage à être plus conscient, plus attentif aux détails. La manière dont nous organisons notre espace physique traduit un intérêt pour les autres et permet le partage avec autrui au moyen d'une ambiance accueillante.

Nous exprimons véritablement la douceur et la précision dans notre environnement.

Quand bien même nous vivrions dans une masure en pisé, avec un sol en terre battue et une seule fenêtre, il suffirait de regarder cet espace comme sacré et d'en prendre soin avec notre cœur et notre esprit pour qu'il devienne un palais.

Et nous, et nous, et nous ....

Et nous ? Il nous faut faire l'expérience de l'unité de notre propre corps. C'est la magie du corps.

Notre corps est composé de la tête et des épaules, des bras et du sexe, du torse et des genoux, etc. Et l'ensemble se doit de former un ensemble harmonieux et foncièrement bon.

Peu importe que l'on commence à avoir des cheveux blancs, des rides sur le front ou les mains qui tremblent, on a quand même la sensation que le corps est en forme, qu'il a une unité qui lui est propre.

En regardant, on entend des sons. En écoutant, on sent les odeurs. En humant, on goûte les saveurs. En savourant, on a des sensation tactiles. Toutes les perceptions sensorielles fonctionnent comme un ensemble, une seule expression de santé fondamentale.

La magie du corps est aussi concernée par le rapport que nous entretenons avec nos habitudes personnelles, par la façon de nous occuper des détails de notre habillement, du manger, du boire, du sommeil.

Prenons l'exemple de l'habillement.

Il ne s'agit pas de nous cacher derrière nos vêtements par peur de nous manifester, mis plutôt de porter des vêtements convenables et qui nous vont bien.

Parfois, quand nous portons des vêtements à notre taille, nous nous sentons un peu à l'étroit. Il se peut que nous nous sentions incommodés par le fait de porter un costume - cravate ou par le fait d'enfiler une robe ou une jupe trop justes. Le serrement que nous éprouvons au niveau du cou, de l'entrejambe ou de la ceinture est en règle générale un bon signe : ils nous indiquent que nos vêtements nous vont bien, mais que notre névrose n'est pas bien à l'aise dans ceux-ci...

Ou l'exemple de la nourriture ...

Il ne s'agit pas d'être toujours à la recherche de mets les plus délicats, mais de prendre le temps qu'il faut pour organiser de bons repas nourrissants, de prendre plaisir à faire la cuisine, à manger, à ranger.

D'être aussi plus attentifs à l'usage que l'on fait de sa bouche... C'est comme si la bouche était un grand trou, une grande poubelle ! C'est aussi par elle que l'on parle, que l'on sanglote ou qu'on embrasse. Si les martiens pouvaient nous observer, ils seraient ahuris par la quantité d'emplois que les humains donnent à leur bouche.

Au fond, il se peut que nous soyons pas obligés de nous en servir autant que nous le faisons. Apprécier notre monde n'est pas synonyme de consommer à chaque instant tout ce que nous voyons.

Nous pourrions manger lentement, avec modération, tout en appréciant notre nourriture. Lorsque nous parlons, nous pourrions dire ce que nous avons à dire tranquillement et marquer une pause, et non constamment lâcher à l'étourdie tout ce qui nous passe par la tête en bavardages futiles.

Alors, quelqu'un d'autre pourrait prendre la parole, ou nous pourrions tout simplement goûter le silence.

En réalité, le principe de base consiste à harmoniser notre relation avec le monde phénoménale avec notre corps. Cette synchronisation est quelque chose que l'on peut réellement percevoir : on peut voir si quelqu'un est en harmonie avec le monde extérieur à sa façon de se conduire, de boire une tasse de café ou de se passer la main dans les cheveux. Nos gestes manifestent toujours ce que nous vivons par rapport à nous même et à notre environnement. Ils expriment aussi bien l'affection que nous pouvons nous porter que le ressentiment et la colère que nous pouvons ressentir à l'égard de nous-même. Ils signalent aux autre que nous avons un bon rapport avec notre environnement ou bien, au contraire, que ce rapport est mauvais.

Le Monde externe et nous !

Finalement, la magie n'est complète que si nous intégrons la magie du monde extérieur et celle de notre corps. Ayant créé un espace sacré autour de nous et synchronisé splendidement notre corps avec cet espace sacré, nous sommes en mesure de provoquer dans notre état d'esprit une vigilance très forte, une extraordinaire immédiateté. C'est l'expérience du "lâcher-prise". Elle donne une sensation extrêmement puissante de vivre l'instant présent. On est jamais ballotté par la confusion de la vie, par l'exaltation et la dépression. Nous pouvons nous accommoder de tout ce qui se présente à notre état d'esprit, sans problème ni hésitation. Cet état d'esprit est exempt de bavardage mental, dénué d'hésitation et d'incrédulité.

Cet état d'esprit peut relier l'immensité de la sagesse primordiale, de la sagesse des traditions du passé jusqu'aux réalités de la vie contemporaine.